Virée du soir. Tard.

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Vendredi soir, fin d’une longue semaine. A l’heure où je rêve de rejoindre mon lit, je suis dans ma voiture. En fait, cela faisait déjà un bon moment que je rêvais de mon lit, mais j’ai attendu, j’ai lutté, puis j’ai pris ma voiture.

Je suis sous la lumière d’un lampadaire glauque, mal garée dans une rue où il n’y a plus une place de libre. Les gens sont chez eux (quelle chance ils ont). Je coupe le moteur, je ne sais pas pour combien de temps je suis là. Cela évitera que je pollue, et que je réveille tout le quartier. Tant pis pour le chauffage, je n’ai pas prévu d’y passer la nuit. Pourtant j’ai l’impression de prendre un quart, comme sur un bateau. Je veille.

Je regarde autour de moi. J’ai quand même l’impression de ne pas être la seule à être garée dans cette rue. Je suis passée devant le N° 19, j’ai ralenti, j’ai essayé de voir à travers la grille, et suis allée me garer. J’ai l’impression de voir d’autres voitures avec quelqu’un au volant. C’est un peu flippant en fait de voir les ombres de ces personnes. Je me fais un peu peur, mais bon, les serrures sont verrouillées.

Je réalise que j’écoute la bande originale du Roi Lion. C’est assez ubuesque d’être dans sa voiture, à 23h45, dans une rue de banlieue, et d’écouter la musique du Roi Lion.

J’envoie un SMS qui appelle comme réponse un « j’arrive tout de suite ». Et c’est le cas. Preuve à l’appui.

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Mais nous n’avons pas la même définition du mot « arriver ». Alors j’attends. Mais je comprends. OK j’ai annoncé par SMS que j’allais repartir. Mais je comprends, il faut le temps de dire au revoir. Je connais ça. J’ai ça dans les gènes. Entre le moment où je décide de partir d’un endroit et le moment où l’on part réellement, il se passe souvent un long moment. Je l’ai transmis à nos enfants. Faire des blablas. Sauf que ce soir, je pense que ce n’est pas ce que j’ai fait de mieux.

Il n’y a plus de chaleur dans la voiture. Il fait même vraiment froid. Je pense que je vais bientôt faire de la buée, ou rallumer le moteur. J’ai sorti un livre histoire de moins me stresser sur ce qui m’environne. Mais je suis sous le seul lampadaire qui clignote. L’intermittence pour lire, ce n’est pas top. Je pense à allumer la lumière de la voiture. Et si je vide la batterie? Est-ce mon ado chéri qui va pousser ma voiture d’1 tonne en sortant d’une soirée?

Il arrive. Il ne sent ni l’alcool, ni la clop. Ouf. Il est minuit pile. C’était l’heure du rendez-vous.

Je n’avais qu’à pas venir avec 1/4 d’heure d’avance.



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19 Comments

  1. Une heure raisonnable
    Un ado ponctuel
    Un ado sage…

    what else?
    🙂

    ps : super, encore 14 ans de « tranquillité » devant moi!!!

  2. … Je crois que c’était une de mes kinés qui disait qu’à force d’attendre ses enfants comme ça elle avait fini par connaitre toute la grille de programme radios par coeur 😉 !

    sinon je me suis souvent faite disputée par ma mère qui me disais que j’avais 20 minutes de retard. En vrai j’avais 5 minutes de retard à peine et elle au moins un quart d’heure d’avance chaque fois.. mais ma mère n’est souvent pas fun 🙁 !

  3. Mais qu’ils sont cools tes ados. J’ai comme dans l’idée que mon rebelle de maintenant 8 ans, sera moins ponctuel…

    Et sinon, je suis comme toi, je mets toujours des plombes à dire au revoir. Partir, c’est un peu mourir.

    1. Le truc c’est que s’ils ne sont pas ponctuels, y’a mesure de rétorsion sur la sortie suivante (raccourcie). Alors ils préfèrent jouer le jeu, mais « fallait que je dise au revoir…. »

  4. En fait ton billet m’inspire alors j’en rajoute une louche (enfin une troisième louche puisque Karmikl sur FB c’est aussi moi) BoN bref.

    En fait, ton billet m’inspire aussi parce que j’ai eu beaucoup de mal à ne pas avoir peur la nuit. Mon père est officier de gendarmerie et selon moi très anxieux. Du coup toute mon adolescence il m’a bourré le mou à mort « la nuit c’est dangereux : il y a des dealers, des voleurs, des pédophiles…. ».
    Après le bac quand j’ai commencé à sortir seule le soir c’était l’horreur : je prenais toutes les poubelles pour des types qui allaient me sauter dessus. Ceux qui était avec moi étaient désespérés, je murmurais « tais toi y’a quelqu’un ! attends c’est sûre que y’a quelqu’un, bouge pas regarde »… En général on me répondait désespéré : « pffff arrête ton délire ! c’est juste un sac poubelle posé sur des trucs pour les encombrants !!! »

    Petit à petit j’ai pris tellement confiance que quand j’ai eu une chambre sur le campus de Nanterre pendant mon stage de fin d’étude je rentrais à minuit sans problème. Faute d’accessibilité je traversais une bonne partie de Nanterre dans le noir comme ça (en fauteuil électrique à 8km/h).
    J’ai compris quelque chose de super essentiel : il faut absolument mettre son imagination sur OFF sinon vraiment c’est pas possible.
    Je suis aussi convaincu que les dealers et autres voyous ont autres choses à faire à minuit que de se cailler à attendre sur le trotoire que tu passes à minuit, d’ailleurs si tu ne te mêles pas de leurs affaires je doute que tu les intéresses beaucoup…

    Maintenant il y a un truc que j’ai remarqué aussi : si je suis stressée par autre choses, j’ai aussi beaucoup plus de mal à être apaisée en me déplaçant la nuit…

    1. hum… tu arrives à te raisonner? moi j’avoue être plutôt flippée depuis un retour sportif un soir où j’aurais aimé ne pas être seule dans ma rue d’un joli quartier parisien.
      Bref, j’essaie de protéger un max les enfants, quitte à faire le poireau, sans les surstresser non plus. Pas simple…

  5. je me retrouve complètement dans cet article , mais 25ans en arrière …
    Terribles ces moments d’attente dans la nuit , où le moindre miaulement d’un chat , le plus petit craquement nous fait frémir. Et l’angoisse qui monte en attendant de retrouver notre ado ,  » dans quel état va-t-il être ? » , mais enfin , cette bouffée de bonheur quand il nous rejoint , heureux , le sourire jusqu’aux oreilles et … l’haleine fraiche . 🙂 Comme elle me parait loin et proche à la fois , cette période que je revivrais avec plaisir …

  6. Je te lis souvent, sans jamais torp oser commenter. Mais cette fois, je l’aime trop, ce billet, pour partir sans laisser de petit mot.
    Il y a 15 ans, J’aurais adoré que mon père comprenne ces deux principes simples :
    – entre le moment où tu veux partir et le moment où tu pars vraiment, il s’écoule (trop de?) temps. Si seulement il avait pu écouter le roi lion tranquille dans la voiture au lieu de se ronger les ongles en m’attendant !
    – minuit, c’est pas minuit moins le quart. C’est le meilleur quart d’heure, celui là!
    Dans 15 ans, l’espère que je serai comme toi, et que je prendrai ces petits moments de solitude avec autant de philosophie!

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